Le rôle des Alerteurs vu par Laurent Bousquet

Divers National
Cet article a été publié le : 19 mai 2021 à 14h26
Le rôle des Alerteurs vu par Laurent Bousquet

Laurent Bousquet, photo P. Barki


Lors du Grand National de Saumur puis de Pompadour, nous avons vu les brassards « Alerteur » de sortie. Ce système mis en place à l’issue de la réflexion stratégique proposée par la Fédération Française d’Equitation (comptes-rendus à retrouver ici) a été présenté lors des Journées du Complet 100% digitales par Michel Asseray et Laurent Bousquet. Petite piqûre de rappel par Laurent Bousquet après deux concours d’exercice.

Comment ont été créés les Alerteurs? 

« Le processus a été décidé l’année dernière et nous l’avons amorcé cette année à Saumur. A Pompadour il y avait un peu plus de monde sur le terrain donc nous avons été un peu plus visibles. Mais je tiens à rappeler que ces épreuves là ne sont pas celles sur lesquelles le système est le plus utile et nécessaire car il y a déjà un bon nombre de gens compétents sur le terrain du fait de l’organisation du Grand National. Ce dispositif va être plus utile sur les plus petits concours un peu moins suivis où le jury n’a pas forcément de vue sur le cross; ne serait-ce que par la configuration du site ou parce que le cross commence alors que le jury est encore au dressage. Pour le moment nous sommes encore en phase de sensibilisation, pour que les gens nous voient et s’habituent à notre présence. Je crois d’ailleurs beaucoup à la prévention plutôt qu’à la répression. On doit voir que nous sommes présents et que cela sensibilise au problème de la sécurité et que les cavaliers fassent un peu plus attention. »

Quelles sont vos actions concrètes sur le cross?

« Il y a un groupe d’une soixantaine de personnes, sur une liste ouverte car certains sortiront et d’autres y entreront surement. L’idée est d’avoir des gens qui sont légitimes dans le milieu du concours complet. Ce sont beaucoup de cavaliers de haut-niveau, des coachs parmi les plus expérimentés, et les membres du staff fédéral. Nous avons vocation à être les yeux du jury sur le terrain. Nous sommes là pour aider les juges à prendre les bonnes décisions si possible. La répartition n’est pas automatique; parfois, nous serons dix sur un concours et parfois seulement un ou deux, en fonction des différentes obligations de chacun. Ces Alerteurs sont mandatés par la Fédération pour avoir un regard sur la sécurité. Nous avons le regard sur l’ensemble du parcours et lorsque que l’on s’aperçoit qu’il y a un comportement à risque, soit par une monte dangereuse ou parce que le cheval est trop fatigué, ou s’il parait évident que le cavalier n’est pas au niveau techniquement, on le signale au jury. A partir de ce moment, c’est au jury de prendre la décision, les alerteurs ne sont en aucun cas aptes à prendre des décisions et des sanctions. Ils doivent simplement informer le jury qui lui ensuite décide seul d’arrêter le cavalier en cours de route ou de le convoquer à l’issue de l’épreuve pour lui expliquer certaines choses voire lui mettre une pénalité pour monte dangereuse. Les Alerteurs n’ont pas d’obligation particulière ou de compte à rendre à la FFE. Nous sommes présents sur les concours souvent pour autre chose, et lorsque les cavaliers font leur reconnaissance, ou les coachs sont avec leurs élèves, on ouvre un peu plus les yeux sur ce qui se passe autour… « 

Est-ce que les Alerteurs peuvent mettre des sanctions? 

« Le brassard jaune des Alerteurs est tout de même très visible, ce qui pour les cavaliers les oblige à se dire qu’ils sont observés, et cela dans un but de les sensibiliser avant tout. Et l’objectif de prévention nous permet d’aller dialoguer avec les gens et leur expliquer comment et pourquoi ne pas se mettre dans des situations à risque. Et il peut y avoir des mesures punitives, seulement si tout cela n’a pas suffit. Idéalement, on devrait rester aux deux premières étapes de la sensibilisation et de la prévention. Et il ne faut pas oublier que les actions ont des conséquences; aujourd’hui en prenant deux pénalités pour monte dangereuse, il y a une obligation de rétrograder de niveau donc le processus s’enclenche et à des conséquences. Il ne faut pas oublier que tout cela est mis en place pour protéger les  cavaliers et les chevaux car il y a aussi le bien-être animal. On protège aussi l’image de la discipline parce que l’on sait que l’image de discipline, potentiellement à risque, n’est pas toujours très bien perçue par le grand public. On ne veut plus voir de comportements à risques. »

Le concept a-t-il vocation à s’étendre? 

« J’ai proposé ce système à la FEI (Laurent Bousquet fait partie du Risk Mangement Steering Group de la FEI) avec l’expérimentation en France et nous leur fournirons un retour d’expériences de cette année. Mais pour le moment les alerteurs n’interviennent qu’au niveau national et non pas sur les épreuves internationales, même si elles se courent en France.

Le slogan « Sécurité, tous concernés » mis en place par la FFE veut dire que tous les acteurs de la discipline sont concernés et sont impliqués pour améliorer la sécurité. Il faut que les autorités, que ce soit le Ministère des Sports, le Comité Olympique et la Fédération, voient bien que tout le monde se serre les coudes pour faire avancer les choses. Montrer que l’on est conscients des risques mais que l’on fait tout ce qui est possible pour les éviter et que nous ne sommes pas fatalistes. Les choses sont en voie d’amélioration, si on regarde les chiffres le nombre d’accidents graves a diminué de façon évidente. Ce qui est plus complexe aujourd’hui, c’est la gestion de l’information qui est mondialisée et très rapide. Il faut faire avec les réseaux sociaux notamment et pouvoir contrôler au maximum la communication autour de ce sujet. Le dispositif des Alerteurs rentre aussi dans cette stratégie de communication car le groupe comte des personnes de divers horizons et nous sommes tous impliqués. « 

Propos recueillis par Mathilde Orion