Journées du Complet : une conférence sur l’entraînement et le climat

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Cet article a été publié le : 20 janvier 2021 à 14h57
Journées du Complet : une conférence sur l’entraînement et le climat

Thibaut Vallette et Qing du Briot lors d'un galop de préparation des JEM de Tryon en 2018 - Photo P.Barki


Cette année pour les Journées du Complet, nous avons choisi de nous intéresser au réchauffement climatique qui impacte de plus en plus notre vie quotidienne. Pour évoquer ce sujet nous avons fait appel au Docteur David Camelot, médecin urgentiste, au Docteur vétérinaire Céline Robert, spécialisée dans l’endurance et à Allan Léon, cavalier international d’endurance.


Dr. David Camelot

Pouvez-vous vous présenter?  

« Je suis David Camelot, j’ai 46 ans et je suis médecin urgentiste. Je suis cavalier de CCE, dressage et CSO, je tourne en Amateur 1. Je suis en charge de la médicalisation des concours complets de Pibrac; d’ailleurs là-bas nous sommes moteur de la médicalisation. À la suite de mon intervention de 2020 lors des Journées, nous avons mis en place un rapport médical que nous utilisons lors des CCE de Pibrac. Je commence également à me former sur la préparation mentale. Je me suis également occupé de la médicalisation du Dakar pendant 4 éditions: trois fois en Amérique du Sud et une fois en Arabie-Saoudite.»

Parlez-nous brièvement du sujet que vous allez aborder. Pourquoi est-ce important de s’intéresser de plus près aux effets du réchauffement climatique sur les cavaliers ?

« France Complet est venue me chercher pour parler de ce sujet que je trouve intéressant. Pour les cavaliers, la chaleur a moins d’impact que pour les chevaux. Il y a une pathologie qui peut apparaitre : le coup de chaleur de l’exercice, cela arrive souvent sur le Dakar lorsque les concurrents sont dans le désert. Cette conférence servira de prévention et vulgarisera le sujet pour que les gens comprennent bien ce qu’il faut faire pour éviter les coups de chaleur par exemple. Je vais expliquer ce qui peut arriver et comment réagir en cas de problème lié à la chaleur. J’expliquerai également les facteurs de risques car c’est important de les connaitre. Habitant dans le sud, il fait chaud l’été, alors j’essaye moi-même de m’habituer à ces chaleurs en montant en début d’après-midi l’été. Il sera intéressant de voir si cette technique est bonne pour les chevaux selon ce que pense Céline Robert. »

Sans trop dévoiler votre sujet, avez-vous un conseil pour nos cavaliers ?

« Il faut déjà pensé à s’habituer à la chaleur. Il est important de bien s’hydrater pour ne pas être en état de déshydratation. Je déconseille de faire un concours si quelques jours auparavant le cavalier a été malade. il faut également limiter la consommation d’alcool surtout pendant les épreuves physiques car l’alcool déshydrate. Lorsque nous sommes en concours nous sommes dans un état  »d’hyper-motivation » et dans ce cas on a tendance à ne plus écouter son corps. On ne ressent pas les petits symptômes comme la fatigue ou la soif. La particularité avec notre discipline est que l’on enchaine avec 3 épreuves, et cet enchainement peut entrainer le corps à se dégrader. En effet les cavaliers sont très équipés : veste ou frac sur le dressage, gilet et/ou gilet airbag sur le cross; ces équipements ne permettent pas au corps de pouvoir correctement évacuer la chaleur. En parlant d’équipement il faut faire attention au tee-shirt que l’on met sous son gilet, il faut que le vêtement permette de bien évacuer la transpiration. »

Selon vous, quelle est la situation actuelle de la France face à réchauffement climatique ?

« C’est une bonne chose d’en parler car le réchauffement est présent dans nos vies, après je ne sais pas si la France est en avance ou non sur ce sujet. L’année dernière nous avons eu des vagues de chaleur importantes donc il faut que nous apprenions à vivre avec. »

Vous intervenez régulièrement aux Journées du Complet, quelle est votre perception de cet événement ?

« J’adore y intervenir ! C’est un exercice que j’apprécie faire et cela me permet de faire du « pratico-pratique ». Les sujets sont tous intéressants, c’est un évènement que j’apprécie, cela me permet de rencontrer des acteurs du Complet et d’échanger ensemble sur différents sujets pour faire avancer les choses. Il est également intéressant d’échanger avec les cavaliers de haut niveau présent pour l’occasion. Malheureusement cette année les rencontres n’auront pas lieu ! Les Journées m’ont permis de me réconcilier avec le cross indoor ! J’ai appris à comprendre et apprécier cette épreuve alors qu’avant je n’étais pas adepte de cela. Mais après avoir parlé avec les cavaliers j’ai compris leur position. On se donne rendez-vous l’année prochaine pour se voir réellement ! »

David Camelot et Roquette Biboulet

 


Dr V. Céline Robert

C’est au tour de Céline Robert, vétérinaire et professeure à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort de nous expliquer son sujet et d’en savoir davantage sur elle. Céline Robert a notamment écrit le livre « Le cheval athlète d’endurance », édité par l’IFCE, pour rassembler les travaux de recherche des programmes « Physiologie Sportive du Cheval d’Endurance » (2004), PEPCE (2008), MAPCE (2009), GenEndurance (2011) et GenEndurance 2-0 (2016-2018) conduits avec l’IFCE. 

Pouvez-vous vous présenter ? 

« Je suis professeure à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort où j’enseigne l’anatomie aux étudiants vétérinaires.  Je fait également de la recherche; mon domaine de recherche est la physiologie et la médecine sportive chez le cheval et plus particulièrement chez le cheval d’endurance. Je suis aussi coordinatrice des relations internationales à l’Ecole Vétérinaire d’Alfort. »

Pourquoi vous êtes-vous intéressée à l’endurance ? Personnellement et Professionnellement.

« Je suis arrivée dans le monde de l’endurance par accident, au début de ma carrière de vétérinaire, je venais juste de sortir de l’école et une organisatrice de course d’endurance avait appelé la clinique où je travaillais pour avoir un vétérinaire pour les épreuves. C’est donc comme ça que j’ai commencé l’endurance, petit à petit j’ai fait des contrôles sur d’autres courses dans la région parisienne. C’était à la fin des années 90, le moment où l’endurance à pris son essor en France. Il y avait donc besoin de vétérinaires. De plus, il n’y avait pas de réelle connaissance sur le cheval d’endurance. On est passés de la randonnée et équitation de loisirs à une activité plus professionnelle. Par ailleurs l’endurance est un milieu accueillant, agréable et où il avait des vraies problématiques scientifiques et intellectuelles à résoudre très intéressantes. Je suis restée dans ce domaine car j’ai eu des sollicitations de la part de Pierre Cazes (ancien sélectionneur de l’équipe de France d’endurance) et ensuite de Jean-Louis Leclerc pour mener des études sur le cheval d’endurance. »

Quel est l’intérêt, selon vous, de s’intéresser de plus près aux effets de l’environnement climatique sur les chevaux ?

« Je le vois de deux façons : en effet on a des changements climatiques et on va être obligés de vivre avec cela; et on le voit déjà, on a des modifications des rythmes des saisons et des températures. Nous sommes confrontés à de nouvelles problématiques. On ne s’est pas tellement posé la question d’un point de vue sportif mais ce sont des problématiques que l’on voit déjà avec l’émergence de certaines maladies que nous ne connaissions pas en France. Ce sont des problématiques qui sont récurrentes quand on a des grands évènements sportifs qui sont sous d’autres climats. On a pu le constater à l’occasion des Championnats du Monde d’endurance en Malaisie (en 2019). En CCE ces problématiques s’étaient également posées à Atlanta lors des Jeux Olympiques en 1996. Ce sont des environnements qui sont chauds et humides, où l’on peut déjà être confrontés à ce type de problématiques; ce sont des sujets très intéressants. »

La France est-elle plutôt en avance ou en retard sur les questions d’adaptation des chevaux et cavaliers face aux réchauffements climatiques ?

« C’est compliqué, nous sommes tellement peu de chercheurs à faire des recherches sportives au niveau du cheval qu’il est compliqué d’avoir un avis sur ce sujet et sur cette problématique qui commence à être ancienne (presque 25 ans). Traditionnellement ce sont les pays Anglosaxons qui sont peut être un peu plus en avance que nous sur ces sujets. L’Australie notamment car ils ont des climats qui sont assez chauds. »

Vous intervenez pour la première fois aux Journées du Complet, quelle est votre perception de cet événement ?

« J’avais déjà entendu parlé de cet évènement, mais je ne savais pas vraiment comment se déroulait les Journées. C’est l’occasion de découvrir bien qu’en visio ça ne sera pas la même chose ! »

 


Allan Léon

Allan Léon est cavalier international d’endurance mais aussi gérant des écuries du Roc’h, à Plounéour-Ménez (29) en Bretagne. Il a travaillé aux Emirats Arabis Unis en 2002 en tant que cavalier pour le Sheikh Mohammed Bin Rachid Al Maktoum. L’année suivante il s’est rendu au Royaume-Uni où il était lad-jockey à West Lockinge Farm, sous les ordre d’Henrietta Knight, entraineur et triple vainqueur de la Gold Cup.

C’est en 2004 qu’il s’installe et crée les écuries du Roc’h. Deux ans après, en 2006, il est classé 3 ème cavalier au niveau national. En 2007, il devient entraineur et chargé de mission en Malaisie pour Royal Terrenganu Endurance Stables du Sultan Mizan, Roi de Malaisie.

En 2008 et 2009 il repart aux Emirats-Arabes-Unis pour être assistant-entraineur de l’Equipe nationale à Al Nasr Stables, sous les ordres d’Omar Al Jerwan, entraineur pour le Sheikh Hamdan Bin Rachid Al Maktoum. Depuis, Allan continue sa carrière sportive en participant notamment aux Jeux Equestres Mondiaux de Tryon en 2018 avec son cheval Spirit de Crouz. En parallèle il est également entraineur en Europe pour Les Ecuries Royales de Bahreïn (du Sheikh Nasser Bin Hamad Al Khalifa) et gère son élevage de Pur-Sang Arabes.

Parmi ses performances majeures, il a notamment fini 3ème du CEI3* 160km Test Event d’Ermelo (NED) en 2020 et remporté le mythique CEI3* 160km de Florac en 2019, classé 7ème en individuel aux Championnats d’Europe à Bruxelles en 2017, Vice-Champion du Monde par équipe et 13ème en individuel à Samorin (SVK) en 2016 avec son cheval de tête, Spirit de Crouz. Avec Armoric de Belcrouz, il a fini 5ème du CEI3* 160km de Madine en 2018. Il a aussi classé plusieurs fois des chevaux aux Championnats du Monde des chevaux de 7ans à Compiègne.

C’est pour son expérience de cavalier et entraineur d’endurance que nous avons invité Allan Léon à intervenir lors des Journées du Complet sur le sujet de l’entraînement face au  réchauffement climatique. Son expérience dans les pays chauds du Moyen-Orient et d’Asie mais aussi en Europe, apportera un éclairage intéressant aux différences d’entrainements en fonction du climat.

Allan Léon et Spirit de Crouz lors de leur victoire à Florac en 2019 – (c) photo Anne Jonchery/L’Eperon

Propos recueillis par Clémence Guéméné