Le Séminaire de Sécurité du Concours Complet FEI éclaire le futur du Concours Complet

Actualité International
Cet article a été publié le : 30 janvier 2025 à 15h14
Le Séminaire de Sécurité du Concours Complet FEI éclaire le futur du Concours Complet

Crédit Photo : FEI


Comme en chaque début d’année, c’est à Lausanne que se sont réunis différents acteurs clés de la filière du Concours Complet autour du FEI Eventing Forum. Sous l’égide de l’américain David O’Connor, médaillé d’or olympique et président de la commission du CCE, plusieurs sujets d’actualité ont été soulevés au cour des deux journées : le futur de notre discipline, la place du Concours Complet aux Jeux olympiques, la sécurité, la formation des officiels…

Le futur du Concours Complet

Non sans rappeler une certaine table-ronde des Journées du Complet qui se déroulait le même week-end, David O’Connor a soulevé à Lausanne le besoin d’une vision claire, d’objectifs réalisables et d’une concentration inébranlable concernant le bien-être des chevaux afin de construire une base solide pour le futur de notre discipline. Au travers des points forts du Complet (le fort attrait des spectateurs, l’accessibilité, les normes élevées du bien-être équin et l’opportunité unique d’être au plus proche de l’action pour les spectacteurs), l’américain souligne également les enjeux de taille auxquels la discipline se doit de faire face (le continuel besoin d’une gestion de risque pour les chevaux et les cavaliers, le coût d’organisation des compétitions, la couverture médiatique restreinte en dehors de la communauté équestre, et la dépendance de la tradition dans notre sport).

Les participants étaient alors invités à s’interroger sur la durabilité de la discipline : comment le Concours Complet peut-il continuer de susciter de l’intérêt au-delà de l’olympisme ? Comment attirer et conserver de nouveaux athlètes et officiels de compétition ? Comment soutenir les organisateurs et leur assurer une viabilité financière ? Et, enfin, comment apposer des mesures qui permettent de conserver le bien-être équin comme une priorité ?

Alors, différentes idées ont émergé, permettant ainsi d’identifier des opportunités de croissance pour notre sport : introduire un nouveau format de compétitions au profil plus attrayant aux yeux des médias, revoir le modèle économique des compétitions de niveau 5* pour augmenter leur attrait, étendre le circuit Coupe des Nations au-delà de l’Europe, augmenter la valeur ludique de la discipline afin d’attirer un plus grand spectre de spectateurs, créer des circuits plutôt que des évènements uniques, et se servir des classements comme outil promotionnel.

Évidemment, la gestion de risques était également centrale à la discussion. Là, les discussions ont soulevé le besoin d’une meilleure éducation des athlètes, des normes de qualifications plus strictes, l’accroissement de l’utilisation de la technologie orientée vers la sécurité, et l’ajustement de la construction des parcours visant à améliorer la sécurité tout en conservant l’esprit compétitif de notre discipline.

La place du Concours Complet aux Jeux olympiques

En introduction à ce lourd sujet qui vient s’emboiter dans celui de l’avenir de notre discipline, David O’Connor souligne l’accueil positif qui a entouré le Concours Complet aux Jeux de Paris avec une audience importante les jours de cross et d’hippique. Ces journées, qu’il dit exceptionnelles, sont importantes, selon lui, pour démontrer l’attrait de notre sport.  Alors, dans la perspective de Los Angeles en 2028, il encourage chacun des participants au forum d’étudier les possibles implications de quelconque changement de format, en tenant compte de leur impact sur l’organisation de l’évènement, les exigences vétérinaires et la cérémonie de remise des médailles.

La réforme du règlement CCE 2026

Si la réforme intégrale du règlement FEI pour la discipline du Concours Complet était initialement prévue pour 2026, cette dernière a été avancée à 2025. Ainsi, toute modification au règlement pourra être appliquée à temps pour les Championnats du Monde de 2026 tout en s’alignant avec les préparations en vue des Jeux de 2028.

Le nouveau règlement passera au vote devant l’Assemblée Générale de la FEI en novembre 2025 après un processus de proposition et de relecture qui incombera aux fédérations nationales et au Memoranda of Understanding.

Des notions clés ont émergé concernant la réforme, incluant la procédure adressant les requêtes quant aux missing flags et les pénalités encourues sur les directionnels, les pénalités allouées aux éléments frangibles, le besoin d’ajuster les MERs pour chaque niveau de compétition, y compris le 2*, l’évaluation de la longueur des parcours en alignement avec l’évolution du sport, et la désignation des officiels dans le haut-niveau qui doit permettre à des nouveaux officiels de gagner en expérience tout en s’assurant que des individus qualifiés soient positionnés aux rôles clés.

L’enjeu des analyses de données (EquiRatings)

Sam Watson, représentant et fondateur d’EquiRatings, a présenté dans le cadre du séminaire FEI une analyse de la gestion de risque se rapportant aux normes des parcours en Concours Complet. Le cavalier irlandais souligne que la prise de décision après une étude de données peut améliorer la sécurité tout en préservant l’intégrité de la compétitivité de la discipline. Il est donc important, selon lui, d’établir des repères mesurables pour guider la prise de décision et d’assurer que le Concours Complet demeure stimulant et sécuritaire pour les participants.

Au cour des dix dernières années, la gestion de risque dans la discipline a été grandement améliorée avec un nombre moyen de chutes de chevaux tombant en dessous des 1% pour la toute première fois (excluant le niveau 1*). Ce résultat souligne la réussite des prises de décisions liées aux données récoltées dans le but de réduire les risques. Malgré tout, Sam Watson insiste sur la nécessité de maintenir des normes élevées de construction de pistes afin de créer des parcours intéressants tout en évitant tout risque inutile : ces constructions ont un rôle pivot dans la préparation du couple athlète vers les plus hauts niveaux.

Un nombre de parcours sans pénalité excessif, tel que plus de 85% dans le cas d’un 4*-L, peut alors indiquer que la difficulté du tour est insuffisante et viendrait miner le développement des compétences nécessaires pour aller courir un 5*. Ainsi, en établissant des indicateurs de risques et de difficultés, le sport pourrait soutenir la progression des athlètes tout en assurant la sécurité.

L’irlandais souligne l’importance d’un bon équilibre entre les risques et le challenge que doivent apporter un parcours : les risques gérables sont intrinsèques à notre discipline et nécessaires pour l’apprentissage. Des chutes dues à des problèmes mineurs, tels qu’un trébuchement à la réception, font partie du sport et peuvent être acceptés si la sécurité globale n’en est pas affectée. Toutefois, les chutes rotationelles demeurent un point très important. Des efforts pour les éliminer au travers d’avancées technologiques et d’ajustement de parcours sont continuellement menées.

Sam Watson met l’accent sur l’importance d’un équilibre entre les différents tests de la discipline, dressage, cross et saut d’obstacles. Les parcours où un bon train de galop et une bonne aptitude physique ne sont pas nécessaires risquent de ne pas préparer suffisamment les couples aux exigences d’un parcours à plus haut niveau. Conserver l’intégrité de chaque test permet d’assurer le caractère unique de la discipline et construit une base pour les niveaux plus élevés.

Les outils utilisés par EquiRatings permettent d’auditer les parcours, les terrains et les chefs-de-piste en mesurant la fréquence de chutes, de parcours sans-faute et autres mesures. Ainsi, des tendances peuvent être identifiées telles que des parcours dont le niveau est continuellement trop faible ou trop élevé, offrant ainsi une structure pour de potentielles améliorations. Il faudra, selon le fondateur, adresser d’importantes questions telles que le nombre acceptable de chutes sur les différents niveaux et comment définir et maintenir les normes des parcours. Les innovations continuelles dans la construction des parcours, des critères d’évaluation précis et l’intégration des technologies visant à la sécurité seront alors essentielles. Selon Sam Watson, en équilibrant challenge et sécurité tout en exploitant les données récoltées, le sport peut demeurer stimulant, compétitif et sécurisé pour tout le monde.

Coachs et athlètes

C’est au travers de plusieurs intervenants, tels que Andrew Nicholson, Phillip Dutton, Andrew Hoy et Ros Canter, qu’a été abordé ce nouveau thème. La discussion, modérée par Bettina Hoy et Pierre le Goupil, s’est attaquée à une importante question : comment améliorer la performance tout en priorisant le bien-être équin ? Au coeur de la discussion : atténuer le risque de fatigue chez les chevaux, et renseignements sur comment conserver un cheval au meilleur de sa forme.

Les intervenants ont également exploré le sujet de la bonne éducation des athlètes sans pour autant avoir à les surveiller de manière excessive, et si la présence d’athlètes d’expériences sur les concours pourraient encourager l’apprentissage de cavaliers moins expérimentés. Là, est soulignée l’importance de la préparation du cheval comme celle du cavalier : si la force et le bon état physique du cheval est essentielle, les capacités physiques et mentales du cavalier le sont tout autant. La discussion s’est ensuite centrée autour du rôle des coachs, et d’autres éléments critiques tels que le rôle du jury de terrain quand il en vient à arrêter un cavalier sur le cross.

Formation des officiels

Anne-Mette Binder, Alex Lochore et Neil Mackenzie-Hall ont présenté lors du Forum les modifications apportées au système de formation des officiels FEI en Concours Complet. Le système révisé se concentre sur la nécessité d’attirer de nouveaux officiels, d’offrir un parcours de progression clair et d’améliorer la qualité du jugement. Parmi les nouveautés, on trouve donc des critères plus clairs jalonnant la progression des officiels, avec des évaluations et des entretiens. Un programme de mentorat sera mis en place pour les chefs-de-piste et les athlètes souhaitant transitioner vers des rôles d’officiels de compétitions auront accès à une procédure accélérée. Ces changements sont prévus pour 2026. D’autres idées ont été avancées lors de la conversation menée, notamment celle d’instaurer une durée de mandant maximale pour les chefs-de-piste sur un même terrain.

Gestion de risques et sécurité en Concours Complet

La dernière session de ce forum était menée le samedi 18 dans l’après-midi. Menée par David O’Connor, Geoff Sinclair et Stuart Buntine, la discussion se concentrait sur le rôle crucial de la gestion de risques dans les sports équestres, et tout particulièrement en ce qui concerne les statistiques de chutes et blessures récoltées entre 2015 et 2024.

Comme mentionné précédemment, le nombre de chutes de cheval a baissé, avec une réduction significative du nombre de chutes rotationnelles. Les chutes sur le plat demeurent une préoccupation, tout comme les blessures sérieuses dues aux chutes rotationnelles. Les statistiques nationales ont démontré une baisse de chute des chevaux en France, en Allemagne et aux États-Unis.

Il a notamment été proposé de rendre publique le Horse Form Index (un index visant à effectuer un suivi des dernières performances d’un cheval sur ses cross en les notant afin que les athlètes, propriétaires et fédérations puissent prendre des décisions éclairées quant à la suite du programme) afin de promouvoir la transparence du sport et motiver cavaliers et propriétaires à améliorer leur score.

L’idée de partager les données collectées sur un parcours (nombre de sans-faute et pourcentage de chutes) avec les officiels et les comités d’organisation a également été avancée, afin de leur permettre d’affiner la difficulté des parcours au fil du temps.

Le résumé complet des discussions à trouver en version originale ici et ici.